(1) Paule de Viguier,
baronne de Fonterville, née à
Toulouse en 1518, décédée en
1610.
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La
goélette, la quatrième du nom
?
" C'est un nom curieux pour un
voilier " s'étonnent de nombreux visiteurs
qui désirent généralement en
savoir plus.
C'est une longue histoire, de presque 500 ans !
Notre goélette est le quatrième
navire à voiles de la Marine royale, puis
nationale, à porter le nom de
Belle-Poule.
Avant elle, trois frégates portèrent
ce nom prestigieux. Elles s'illustrèrent
plus ou moins brillamment, vécurent
longtemps sans toutefois atteindre l'âge de
l'actuelle détentrice du nom, sous le
pavillon français mais aussi sous celui de
la "perfide Albion".
· La première fut une frégate de
30 canons, armée en 1765 à Bordeaux,
et qui participa au premier combat de la guerre
d'indépendance des Etats-Unis,
· La seconde portait 40 canons et fut
construite à Nantes,
· La troisième a été
lancée en 1834. Ce fut elle qui ramena les
cendres de l'Empereur de
Sainte-Hélène.
Mais la toute première Belle-Poule ne
fut-elle par un navire corsaire ou flibustier ?
En effet, les origines du nom ne sont pas
très bien connues. De nombreuses
hypothèses ont cours, et toutes font un jour
allusion à Paule de Viguier(1)
.
Je n'en retiendrait qu'une, la plus
fréquemment entendue, la plus romantique
aussi et que voici :
Au sujet de la goélette de l'Ecole navale,
l'amiral Wietzel rapportait en 1954 :
" Le nom de Belle Poule, s'il évoque
d'honorables souvenirs historiques, s'il est, comme
disait Chateaubriand, "cher à nos anciennes
victoires maritimes", retentit si bizarrement
à l'oreille que beaucoup de familles en 1932
s'alarmèrent de voir leurs midships naviguer
à bord de l'annexe de l'Ecole Navale sous
l'égide d'une entité symbolisant
peut-être les caprices et l'ensorcellement
des eaux et des vents, mais n'ayant point le
caractère de gravité que l'on peut
attendre de la dénomination officielle d'un
bâtiment de l'Etat .
Il fallut expliquer que ce nom était un
héritage de la Marine Royale qui,
elle-même, avait relevé le nom d'un
fameux corsaire de la Gironde, lequel était
emprunté à une personne de la
Renaissance, célèbre par sa
merveilleuse beauté: La "Belle Paule" de
Toulouse ".
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Corsaire
ou flibustier ?
Ainsi notre histoire, ou plus
précisément celle de la "
Belle-Poule", semble commencer au début du
XVI-ème siècle, sous François
1er.
Si j'emploie le conditionnel, c'est que les
certitudes historiques, comme nous allons le voir,
ne sont pas de mise ici.
Par une belle journée de 1533, une jeune et
fort belle Toulousaine fut choisie par les
capitouls toulousains pour réciter le
compliment d'usage et remettre les clefs de la
ville au Roi, lors de sa venue. Elle avait alors 15
ans. Cette jeune personne, alors déjà
célèbre pour sa radieuse
beauté, s'appelait Paule de Viguier, baronne
de Fonterville.
Envoûté et charmé par sa
grâce, François 1-er, connaisseur, la
surnomma " La belle Paule "; ce qui en occitan
devient " Bella Paula " et se prononce " Bella
Paoula " ! Paule de Viguier devait traverser avec
ce surnom six règnes successifs et
s'éteignit à l'âge canonique de
92 ans.
La dame faisait beaucoup rêver, et il
semblerait qu'un corsaire bordelais qui
désirait emporter son image à travers
ses courses lointaines lui dédia un jour son
navire. Il devint par la suite le plus glorieux
corsaire de l'endroit.
Il est toutefois peu probable que Paule de Viguier
et ce corsaire aient été
contemporains. ; En effet, au XVI-ème
siècle il n'y avait pas encore de "
corsaires " mais des " flibustiers ". Ces derniers
étaient en général des marins
déserteurs ou égarés qui,
réunis en bandes plus ou moins nombreuses,
portaient partout les ravages de terreur. Leur
théâtre d'opérations
étaient les îles de l'Amérique
Méridionale.
Il serait assez surprenant que Louis XV ait
décidé comme nous le verrons, plus de
200 ans plus tard, de donner à une
frégate royale le nom d'un navire "
flibustier ".
En effet, les premiers " corsaires " dignes de ce
nom sont en fait apparus vers 1650, c'est à
dire sous Louis XIV.
A cette époque, chaque port de France armait
des bâtiments corsaires qui
répandaient sur la Manche et l'Océan
la terreur du pavillon bleu à croix blanche.
Le pavillon des vaisseaux du Roi était
blanc, celui des galères rouge semé
de fleurs de lis d'or, ainsi que celui des navires
de commerce. Les capitaines de navires corsaires
portaient généralement ce pavillon
bleu à croix blanche, quelques-uns
arboraient celui de leur province (Jean Bart celui
de Dunkerque, Surcouf de Saint-Malo).
Il y avait un aspect officiel à cette
activité. Il fallait obtenir de
l'amirauté une commission autorisant la
course. Celle-ci permettait d'armer un
bâtiment, n'importe lequel pourvu qu'il fut
bon voilier ; on y mettait quelques canons, on
engageait un équipage et on partait .....
surveiller les côtes ennemies.
Quelquefois le corsaire rentrait triomphant au
port. Là, le capitaine devait faire une
déclaration à l'amirauté qui
recevait un tiers de la prise.
Si notre bordelais était un corsaire, il
reçut donc probablement une lettre de course
de Louis XIV et subjugué par la
renommée de la baronne de Fonterville qui
avait traversé les âges, emprunta son
nom à la renaissance !
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